Rencontre avec Manon du blog Happy New Green - Une fashion revolutionnaire

 dans Portrait
Temps de lecture estimé à 5 minutes

Manon a 27 ans, fait des études en développement durable et tient un blog passionnant sur la mode éco-responsable, Happy New Green. On a passé une heure avec cette jeune femme très motivée pour que la planète mode devienne plus verte. Itinéraire d’une jeune fashion révolutionnaire.

Quel a été ton déclic vers la mode éthique ? Avant d’être blogueuse green, tu as une formation de journaliste, n’est-ce pas ?

Tout à fait. Je voulais sensibiliser les gens sur des thématiques de société, politique…d’une manière très simple, sans être dans le militantisme. Et pendant que je cherchais un travail après la fin de mes études, j’ai lu le livre d’Elizabeth Laville « Vers une consommation heureuse » . Ça disait que la consommation matérialiste ne fait pas le bonheur, un truc assez évident…mais pourtant, on ne s’y met pas ! Et là, je me suis dit qu’il fallait absolument que je fasse un blog sur la mode éco-responsable. Pour moi il y un problème. La mode, telle qu’on la consomme généralement, ne nous rend pas heureux.

D’où vient ce problème alors ?

Quand tu achètes un vêtement, tu es hyper contente ! Tu as presque l’impression que ça peut changer ta vie. Et puis deux mois après, tu as envie de le revendre et tu t’en fous. Ce qui rend heureux sur le long terme, c’est de faire un voyage, avoir des souvenirs... Alors même si j’adore toujours autant acheter des vêtements, je ne vois pas en quoi avoir une armoire pleine à craquer va nous rendre heureux. J’ai l’impression qu’on se fout un peu de nous.

Donc tu as créé ton blog, Happy New Green…

J’ai passé 3 mois à faire des recherches en permanence, j’étais à fond, j’allais à des conférences, des salons, je lisais… J’ai basculé dans un univers hyper actif, hyper riche ! C’était extraordinaire ! Tu rencontres plein de gens, des créateurs qui ont les mêmes valeurs que toi. J’avais envie d’écrire sur tout ce que j’apprenais et découvrais.

Se mettre à la mode éthique, ça se fait du jour au lendemain ? Qu’est-ce que ça change ?

Pour moi il y a clairement un avant et un après. J’y suis venue par étapes ! Avant de créer Happy New Green, j’avais déjà commencé à vérifier un peu plus ce que j’achetais. Je connaissais des petites marques made in France, comme Scarlett Roos, La Petite Française… Mais je me suis rendu compte

en allant sur des salons, que niveau transparence, c’était pas top. Que dans le Sentier, tu as des ateliers de confection clandestins, où les conditions de travail, c’est limite pire qu’en Chine. Donc j’avais beau avoir arrêté d’acheter des fringues en fast fashion, ce n’était pas forcément beaucoup mieux. Ça, ça a été une grosse claque pour moi. Je me suis dis « Je fais n’importe quoi en fait, j’achète du made in France, mais à des prix super bas, comment c’est possible ? ». La qualité était mauvaise, ça s’abimait vite. À ce moment là, je me suis mise à douter d’un peu tout. J’ai fait énormément de recherches, pour avoir le maximum de certitudes sur les conditions sociales et environnementales de fabrication.

"Je me suis mise à douter d’un peu tout ce que je croyais savoir sur la mode"

C’est compliqué de vérifier ?

Assez, oui ! Surtout s’il n’y a pas de label. Il faut faire beaucoup de recherches, interroger les marques, leur demander du détail, des photos des usines. Si la marque ne donne aucune garantie côté environnement, je le précise quand j’en parle. Après il faut rester très humble et dire à quel point c’est compliqué de tracer le parcours précis d’un vêtement, à quel point on a besoin de plus de transparence, parce que sinon, ça ne va jamais avancer.

Quelle place tient le green aujourd’hui dans ta vie ?

Ma vie n’est pas 100% green. Je ne limite pas mes trajets en avion. Je ne m’interdis pas de prendre ma voiture le week-end si j’ai envie d’aller en forêt par exemple. Mais dans mon mode de consommation au quotidien, clairement, j’essaie depuis plusieurs années d’être le plus green possible.

Ça doit faire environ 6 ans que je mange bio. Je ne mange presque plus de viande, très peu de poisson, j’achète pas mal en vrac.

Pour les produits ménagers, j’utilise du vinaigre blanc, j’essaie d’utiliser des liquides vaisselle en gros contenants, je n’utilise plus de papier essuie-tout depuis des années, je fais le ménage avec des micro-fibres… Ce genre de choses, c’est tellement facile à mettre en place, je n’ai pas l’impression de faire des choses extraordinaires. Enfin, au début je me disais que c’était impossible : rien que de ne plus acheter de l’essuie-tout je trouvais ça incroyable ! Mais en fait, tu remplaces hyper facilement ces trucs là. Après il y a des choses qui sont compliquées à faire aujourd’hui : pour faire toutes ses courses bio par exemple, ça prend du temps, il faut faire plusieurs magasins… Et il faut bien le dire, je manque parfois d'un peu de patience, donc je ne suis pas « parfaite » sur tout ça.

Est-ce que tu essaies de communiquer le virus green à tes proches ? Tu arrives à ne pas les embêter s’ils font leurs shoppings chez H&M ou se nourrissent uniquement de côtes de bœuf ?

Je n’ai pas très envie de culpabiliser mes proches, et de fait, je ne vais pas forcément faire la rabat-joie auprès d’une copine qui va faire du shopping chez H&M. Mais par exemple, avec mon copain, qui a des goûts bien précis (et bien compliqués !), je vais l’emmener dans les bons magasins, et quand quelque chose lui plaît, je vais lui dire : « Tu as vu ? C’est fait en France, avec des matériaux locaux… ». Je ne vais pas forcément le convaincre en soi d’acheter éco-responsable, il faut d’abord que le style lui plaise.

Après avec mes amis, si j’ai une vraie discussion sur le sujet, je vais dire exactement ce que je pense, ce que je sais sur les conditions de travail, etc… Mais je suis aussi beaucoup plus à l’aise à en parler sur le blog, tout simplement parce que ce sont des sujets complexes, et un peu tristes parfois.

"Il ne faut pas accepter, il faut que ça change, même si ça ne se fait pas dans l’immédiat."

Les marques parfaites existent-elles ? En tissu bio, de fabrication locale, labellisées, transparentes…

On cherche ce qui se rapproche le plus possible de notre idéal. Et on réclame du changement. Il ne faut pas accepter, il faut que ça change, même si ça ne se fait pas dans l’immédiat.

Et que peut faire un consommateur/une consommatrice pour ce changement ?

Il faut en parler autour de soi, à ses amis. Signer des pétitions aussi, tout ce qui devient viral. Envoyer des messages aux marques sur les réseaux sociaux pour demander comment le vêtement à été fait. Elles répondent !

Et bien sûr il faut chercher à consommer mieux, c’est la base. Il faut le prendre comme un jeu ! Je ne peux pas dire : “il ne faut pas se prendre la tête”. Il faut faire l’effort de chercher et de se renseigner. Mais il y a une vraie satisfaction quand tu trouves le vêtement que tu cherches. Celui-là, tu ne vas pas le jeter dans deux mois. Bon, c’est un peu cher, donc tu pleures, ah ah ! Mais bon… Tu as trouvé une fringue qui correspond  à ce que tu veux !

Ça change ton plaisir de porter des vêtements ?

Complètement. Avant je ne m’attachais pas à mes vêtements, maintenant beaucoup plus. Je me sens hyper bien dedans. Et ça ne me dérange plus de mettre plusieurs fois le même vêtement en peu de temps.

Tu as trouvé un truc qui te va, tu n’as plus envie d’un truc qui ne te plaira pas longtemps, qui est dans la tendance mais dont tu sais que ça ne durera pas. Tu trouves tes basiques.

Comment imagines-tu le futur de la mode ?

Je pense qu’on va tous venir à des tenues basiques justement. On va twister nos tenues, avec des bijoux par exemple : changer un truc, qui donne l’impression d’être différente avec les mêmes vêtements.

Je fais aujourd’hui des études en développement durable. La mode c’est la deuxième industrie la plus polluante au monde. Pour moi, c’est sûr que c’est impossible de continuer comme ça. Il ne faut pas culpabiliser les gens, mais il faut que tout monde sache que c’est impossible. Ce qu’il faut, c’est consommer moins de ressources. Il faut consommer plus responsable mais aussi consommer moins.

C’est au consommateur d’ajuster son comportement ou aux politiques d’agir ?

C’est hyper important comme question. C’est les deux, c’est sûr. La loi sur le devoir de vigilance des sociétés qui a été votée en début d’année, c’est super : nous sommes pionniers en France. Les entreprises sont en train de se bouger pour embaucher des gens en Responsabilité Sociale et Environnementale. Les lois doivent bouger. On ne peut pas juste demander aux gens de se compliquer la vie. Le politique doit aussi agir.

Manon porte une veste Roseanna et un jean Nudie Jeans.

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EnregistrerManon Quinti sur un banc

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Claire Chapoutotgeeketbio_photobio