Le no bra: 2020, fin des soutiens-gorge ?
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Le no bra: 2020, fin des soutiens-gorge ?
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Le no bra: 2020, fin des soutiens-gorge ?
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Durant le confinement, un grand nombre de femmes a laissé son soutien-gorge au placard, faisant connaître au mouvement du no bra un nouvel essor. Simple tendance ou réelle révolution du soutien-gorge? Dans cet article, nous revenons sur ce phénomène et le confrontons à l’histoire du soutien-gorge. Découvrez d’ailleurs deux superbes marques labellisées SLOWEARE , Olly & Lolo Paris, qui viennent bousculer un peu les codes en termes de lingerie 😉
« Couvrez ce sein que je ne saurais voir » … Ou comment le no bra chamboule le monde de la lingerie
Cette célèbre citation tirée de la pièce Tartuffe de Molière (1664)[1] permet de se rendre compte que la vision de la poitrine des femmes a toujours suscité bien des émois.
Aujourd’hui, c’est pourtant bien le mouvement du no bra qui connaît un essor, notamment suite à la période de confinement que l’on a connue.
Le no bra, c’est simplement le fait de ne pas porter de soutien-gorge (bra en anglais signifiant soutien-gorge).
Photo à la Une : Olly ©Maëva Delacroix
LE NO BRA, MOUVEMENT EN PLEIN BOOM
En effet, confinées chez elles, beaucoup de femmes ont cessé de porter leur soutien-gorge, souvent par choix de confort. Des sondages[2] ont été faits et ont montré que près d’1 femme sur 5 âgée de 18 à 24 ans ne portait plus de soutien-gorge durant cette période.
Le fait de ne plus être exposées aux regards extérieurs, et donc à toute forme de jugement, a pu libérer les femmes qui ne se sont plus senties obligées de mettre de soutien-gorge. Beaucoup avouent d’ailleurs que retirer leur soutien-gorge est l’une des premières choses qu’elles font lorsqu’elles rentrent chez elles, ce qui laisse entendre que c’est dans l’espace public que s’exerce cette contrainte.
Ce mouvement n’est pas nouveau : de nombreuses femmes pratiquaient déjà le no bra, comme en témoignent les multiples vidéos témoignages sur les différents réseaux sociaux depuis quelques années. De la même manière, certaines stars[3] s’affichent ouvertement sans soutien-gorge et on a vu fleurir sur les réseaux sociaux des « no bra challenges ». Ainsi se sont formées des « communautés bra ».
Toutefois, la tendance s’est clairement accélérée pendant le confinement, et ce, dans de nombreux pays, ce qui traduit un changement de regard sur ce vêtement féminin et, dans une autre mesure, une évolution du rapport des femmes avec leur poitrine.
LE NO BRA, UN GESTE PAS SI ANODIN
Le fait de porter ou non un soutien-gorge semble a priori relever du choix individuel de chaque femme. Or, au vu des réactions que cela engendre dans l’espace public, le no bra révèle également un ensemble d’injonctions et de non-dits de la société à l’égard des femmes.
Les raisons de ce choix de porter ou non un soutien-gorge sont souvent de plusieurs ordres.
Une des raisons principales de ne pas le faire reste le confort. En effet, un certain nombre de reproches sont adressés à ce sous-vêtement : baleines inconfortables, sensation d’oppression, difficultés à respirer, marques rouges dans le dos, formes inadaptées…
Mais ce ne sont pas les seules raisons. Le no bra recouvre également une dimension militante, liée aux mœurs de notre société.
Cela se comprend notamment dans le contexte où ce mouvement est né. Il a débuté à la fin des années 1960 (coucou Mai 68 !), a été lancé par des féministes qui dénonçaient le soutien-gorge comme objet d’oppression et de contrainte sociale.
Sans oublier le fait que de nombreuses féministes jugées plus « radicales » comme les Femen[4] arborent aujourd’hui encore leurs seins nus comme message politique, pouvant choquer hommes et femmes. Montrer sa poitrine dénudée peut devenir dès lors un acte militant.
Beaucoup de femmes aimeraient rejoindre le no bra mais la pression sociale et les regards extérieurs les retiennent même d’essayer. Franchir le cap est souvent perçu comme un acte courageux.
INJONCTIONS SOCIÉTALES & MŒURS : LA PLACE AMBIGUË DES SEINS DANS LA SOCIÉTÉ
Pour autant, ce n’est pas tant la poitrine qui pose problème mais les tétons. Cela s’observe notamment sur les réseaux sociaux avec la censure de certaines photographies parce que le téton est trop visible ou trop explicite (on se rappelle de la campagne #FreeTheNipple débutée en 2014).
Pour Camille Froideveaux-Metterie, philosophe et autrice, les tétons représentent à la fois la fonction nourricière, maternelle et la fonction sexuelle des seins. Et c’est pourquoi les montrer dans l’espace public devient problématique car cela relève de la sphère privée et intime.
Il y a, toutefois, un paradoxe intéressant à soulever, où le soutien-gorge joue un rôle important.
Les dernières décennies ont été marquées par des soutiens-gorge qui, justement, rendaient les seins très visibles: rembourrage, push-up, soutien-gorge ampliforme etc., mais lissant les tétons, devenant alors invisibles.
Cela a ainsi contribué à l’hypersexualisation de la poitrine des femmes.
Gala Avanzi, journaliste et bloggeuse[5], soulignait d’ailleurs dans une interview[6] que les vêtements (les hauts notamment) étaient taillés en fonction des soutiens-gorge dans le but de mettre en avant la poitrine, et non en fonction de la forme de la poitrine (si tant est qu’il n’y ait qu’une seule forme de poitrine).
De la même manière, avec les soutiens-gorge dits standardisés, un nouvel idéal de poitrine est né :
« Un sein suffisamment rond, suffisamment gros, suffisamment haut, qui correspond à un idéal qu’on retrouve depuis l’Antiquité. Il est imposé aux femmes par des soutiens gorges qui viennent façonner les seins pour que ceux qui ne souscrivent pas à l’idéal puissent devenir conformes. »
explique Camille Froideveaux-Metterie[7].
LE SOUTIEN-GORGE, UN OBJET RÉVOLUTIONNAIRE À SON ÉPOQUE
Mais, au fait, d’où vient le soutien-gorge ?
Le soutien-gorge a été inventé par Herminie Cadolle[8], une ouvrière féministe révolutionnaire, en 1889. Le « corselet-gorge » a été présenté lors de l’Exposition universelle et avait été nommé « Bien-Être » par sa créatrice. Ce nom évocateur traduit en effet la rupture totale avec le corset, porté par toutes à cette époque, puisque le corselet-gorge était désormais composé de deux pièces, libérant l’estomac.
Herminie Cadolle se lancera plus tard dans la confection de lingerie et fondera la Maison Cadolle[9] qui est toujours en activité aujourd’hui.
Une autre femme a contribué à la création du soutien-gorge moderne: Mary Phelps Jacob[10], une Américaine qui a vécu au début du XXe siècle. Elle créa en 1913, dans la même démarche que Herminie Cadolle pour trouver une alternative au corset, le premier soutien-gorge avec deux triangles en tissu de lin reliés ensemble, baptisé « Caresse Crosby ».
Ces deux inventions ont donc conduit au soutien-gorge d’aujourd’hui. Il apparaissait à l’époque comme révolutionnaire car apportait un confort et une liberté de mouvement inédits aux femmes, le corset étant source de douleurs, de déformation des organes et empêchant les gestes les plus simples: marcher, courir, s’assoir…
Le soutien-gorge est devenu, au fil des décennies, incontournable et a rencontré un incroyable succès auprès des femmes à partir des années 1920.
Ainsi, le soutien-gorge d’aujourd’hui, perçu comme objet de contrainte, a été initialement conçu comme objet d’émancipation et de libération des femmes et a permis, dans une certaine mesure, cette émancipation. Ce paradoxe s’explique d’autant mieux que le soutien-gorge n’a pas beaucoup évolué dans sa forme depuis un siècle tandis que la morphologie des femmes, leurs besoins et leurs activités se sont profondément transformés.
UNE NOUVELLE APPROCHE DU SOUTIEN-GORGE
Malgré tout ce qui lui est reproché, le soutien-gorge n’est pas rejeté par toutes, bien au contraire. Chaque femme a un rapport différent avec ses seins et le fait de porter un soutien-gorge ou non.
Pour des femmes ayant une petite poitrine et en étant complexées, le soutien-gorge est là pour rassurer.
Les femmes ayant une forte poitrine qui nécessite du maintien, considèrent leur soutien-gorge comme nécessaire à leur confort.
De la même manière, il y a énormément de femmes pour qui mettre de la lingerie contribue à les faire se sentir belle. Le soutien-gorge a alors une part importante dans leur vie sentimentale et sexuelle.
En cela, au-delà du soutien-gorge, c’est peut-être le soutien-gorge « standardisé » qui est rejeté car il « nie » la diversité des seins tout en contribuant à l’hyper-sexualisation[11] de la poitrine des femmes.
Beaucoup d’entre-elles ne se reconnaissent pas ou plus dans l’offre de soutien-gorge[12]. Elles aspirent à avoir la liberté de porter ou non un soutien-gorge, et à avoir le choix quand elles décident d’en mettre un.
UNE DIVERSIFICATION DE L’OFFRE
Cette demande, portée en partie par le mouvement du no bra et du bodypositivisme, a été prise en compte par les marques et enseignes ces dernières années.
Depuis deux ou trois ans, on peut observer dans les rayons des boutiques de lingerie et sur internet une diversification de l’offre en terme de soutiens-gorge avec, entre autre, des bralettes ou des brassières qui n’ont pas d’armatures, ni de coque, ce qui laisse la poitrine dans sa forme naturelle.
C’est notamment le cas de la marque labellisée Olly dont la démarche est de, justement, proposer des sous-vêtements féminins bio qui soient confortables et respectueux de la peau. La marque propose des triangles sans armatures qui valorisent la forme naturelle de la poitrine. Les couleurs et les finitions sont élégantes et épurées, les matières douces et agréables à porter.
D’autres marques innovent et cherchent à mettre en avant le confort et l’esthétique pour toutes les morphologies, comme la marque Lolo Paris. Cette marque a décidé de célébrer la diversité des corps et de prôner l’inclusion en proposant de la lingerie faite sur-mesure avec des matières éco-responsables. Grâce à de nouveaux algorithmes[13], vous pouvez vous commander un ensemble de beaux sous-vêtements parfaitement adaptés à vos formes.
Finalement, le soutien-gorge n’est peut-être pas si problématique en lui-même. Il tend à évoluer au gré des mœurs, ses formes s’adaptent aux nouvelles envies et revendications, grâce au travail passionné de créateurs et créatrices qui sont dans une recherche permanente du mieux et du plus juste.
Pour en savoir plus
- http://cheekmagazine.fr/societe/no-bra-soutien-gorge-feminisme/
- https://www.brut.media/fr/news/ne-plus-porter-de-soutien-gorge-un-geste-loin-d-etre-anodin-a7855640-c98e-4b80-a1bb-ec59cda06c6b
- Travaux de Camille Froideveaux-Metterie > Seins : En quête d'une libération, Anamosa, 2020, 224p
- http://www.slate.fr/story/192384/confinement-fin-soutien-gorge-armatures-confort-seins-poitrine
- Interview Média Simone - Marie Bongars, https://www.facebook.com/SimoneMedia/videos/667324563810281/, 14/04/20
SOURCES
- [1] Acte 3, Scène 2
- [2] https://www.ifop.com/publication/le-boom-du-no-bra-tendance-de-fond-ou-effet-de-mode/
- [3] Rihanna & Jennifer Lawrence — https://www.lemonde.fr/m-perso/article/2018/11/16/no-bra-la-revolution-du-sans-soutien-gorge-est-en-marche_5384486_4497916.html
- [4] https://www.gentside.com/femen/
- [5] https://www.galasblog.com/no-bra-pourquoi-je-ne-porte-plus-de-soutien-gorge/
- [6] Interview Konbini du 10 décembre 2019
- [7] https://www.brut.media/fr/news/ne-plus-porter-de-soutien-gorge-un-geste-loin-d-etre-anodin-a7855640-c98e-4b80-a1bb-ec59cda06c6b
- [8] https://www.franceculture.fr/histoire/a-lorigine-du-soutien-gorge-une-feministe-revolutionnaire
- [9] https://www.cadolle.com/fr/content/14-notre-histoire
- [10] http://women-inventors.com/Mary-Phelps-Jacob.asp
- [11] https://feministshould.com/feminisme/hypersexualisation-du-corps-des-femmes/
- [12] https://www.hunkemoller.be/fr/soutiens-gorge/modeles-soutien-gorge
- [13] https://www.lolo.paris/notre-concept
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